La vie est un si grand mot que l'on ne peut la définir. C'est un mélange de tout ce qui fait de l'Homme : un Homme, sans que personne ne puisse l'expliquer. Certain la vénèrent tandis que d'autres la maudissent et pourtant elle coule dans les veines de chaque être vivant. La vie n'est faite que de surprises, bonnes ou mauvaises, et c'est ce qui fait d'elle le plus beau joyaux de ce monde. Mais elle renferme aussi l'horreur de la nature humaine, et provoque trop souvent souffrance et déception, car comme toute chose la vie n'est point digne de confiance. Nul ne sait jamais lorsqu'elle se montrera clémente ou cinglante, si bien que l'Homme est totalement à sa merci sans aucune arme ni défense.

Durant son enfance, Roxane fut toujours dotée d'une curiosité et d'une malice sans pareille. C'était une petite fille pleine de joie et de bonne humeur, qui ne pouvait qu'apporter le sourire à ses proches. Sa gouvernante aimait la voir aussi épanouie, et faisait son possible pour la petite princesse ne cesse jamais d'apprendre et de rire malgré les nombreuses déceptions que lui vouaient ses parents. Lorsque la pluie se déchainait sur New York et que d'épais nuages menaçaient la grande ville, l'enfant étirait ses lèvres rose bonbon et plissait ses yeux pétillants. Elle affirmait alors que ce n'était que le bon Dieu qui nettoyait le paradis pour que chacun puisse se sentir chez lui lorsqu'il arriverait là-haut. Elle avait une foi aveugle en la vie, et ne se décourageait que très rarement, comme si quelque chose en elle la poussait à toujours se relever. La fillette avait un caractère plus fort que n'importe quels obstacles qui se dressaient devant elle, même si ces derniers étaient bien plus grand qu'elle. Sa duègne en avait été fière jusqu'à son dernier souffle, comme si c'était sa propre fille qu'elle voyait grandir depuis toujours. Mais la vie s'assombrit alors que la gouvernante perdait son souffle, et le regard de Roxane devint alors aussi noir que l'enfer. Elle se sentait trahit par tous, comme si le destin lui avait arraché ses ailes d'ange alors qu'elle était en plein vole. Elle tomba dès lors au beau milieu des pleures et de la solitude. Elle qui n'inspirait que la chaleur humaine, elle devint bientôt incapable de ressentir la douceur de la pureté enfantine, salie par un secret qui n'était autre que celui de la mort de l'être qui était le plus cher à ses yeux. Partagée entre la haine et la douleur, l'adolescente perdit toute foi en l'existence. Par la suite, elle devint allergique au bonheur tandis que l'amour avait l'effet d'un acide sur son cœur brisé. Bien qu'elle n'ait pas vécu que des moments de tristesse depuis, la demoiselle fut désormais incapable de trouver la paix car son âme se déchirait chaque jour un peu plus. La pluie devint alors le torrent des larmes des pêcheurs et la neige immaculée fut le symbole d'une innocence perdue. En à peine quelques années, la belle se renferma dans une coquille de mélancolie que nul ne pu entrevoir jusqu'à ce jour.

Roxane côtoyait l'avocat depuis près de six mois déjà. Ils avaient eu certaine conversation à cœur ouvert, où le jeune homme avait raconté à la brunette le décès de son épouse et de sa mère. Deux femmes aussi admirable l'une que l'autre, qui avaient laissé derrière elles une sorte de trou noir dans le cœur du défenseur. Entre deux contrats de la tueuse, lors d'un de leurs rendez-vous autour d'un café, le bel homme s'était confié un jour où la peine s'était accentuée. Les yeux remplies de compassion, Roxane avait longuement cherché ses mots pour adoucir la douleur de son compagnon. Elle comprenait mille fois ce qu'il ressentait et ne l'aurait souhaité à personne, encore moins à un être aussi charmant et doux que lui. Elle avait tant d'admiration pour cet homme car il était tout le contraire d'elle. Après la mort de ses deux anges, il était resté droit et juste. Il avait prit le peu de foi qui lui restait, et s'en était armé pour se battre dans les épreuves que la vie lui imposait. Comparé à lui, la belle avait été bien lâche d'abandonner toute son humanité pour que vengeance soit faite. Du moins c'est ce qu'elle pensait, mais dès leur première rencontre, l'avocat avait ranimé en elle une flamme d'espoir perdue depuis si longtemps. Elle ne savait pas pourquoi, mais plus le temps passait et plus elle semblait s'attacher à cet homme. Au faire et à mesure qu'ils devenaient amis, elle attendait leur rendez-vous avec impatience, et lorsqu'elle le voyait, elle ne pouvait s'empêcher d'afficher un sourire d'enfant. Elle ne s'était jamais sentit aussi bien avec personne, et c'est malheureusement ce qui lui faisait le plus peur car son second métier ne lui permettait pas d'avoir de quelconques sentiments ''humains''. Pourtant la jeune femme donnerait tout pour rester avec cet homme. Et alors que ses larmes coulaient à flot, une vague de sentiments de toutes sortes déferlait en elle. Elle ne savait plus quoi penser ni quoi dire tandis que la douleur lui écrasait le cœur.

C'est alors que Samuel vint doucement s'asseoir à côté de la belle, puis non pas sans hésitation, il lui passa le bras autour de l'épaule. Roxane leva alors la tête et planta ses yeux gris souris dans le regard si doux de son ami. « Je ne sais pas, Roxane... je ne sais pas. » murmura t-il sincèrement. Sa voix était pleine d'attendrissement, mais un petit pincement lui nouait la gorge. « Est-ce qu’il y a quelque chose dont tu aurais envie que l’on parle ? Des problèmes personnels ? Au travail ? » Il cherchait visiblement des réponses aux pleures de la demoiselle, mais ne savait où chercher. « Est-ce que quelqu’un t’a fait du mal ? » dit-il sur un ton plus sombre, avant de finir par une phrase qui voulu rassurer la jeune femme. « Tu sais que tu peux tout me dire. » Les sanglots de Roxane s'étaient amoindrit, et sans rien attendre en retour, elle finit par poser sa tête sur l'épaule de son compagnon. Il sentait le gel douche pour homme mélangé à un parfum de lessive venant de son t-shirt tout propre apparemment. La brunette ferma alors les yeux et savoura la paix que lui apportait son hôte. Pour la première fois depuis longtemps, elle se sentait en sécurité, mieux que cela, elle était en confiance. Peut-être qu'avec Lui se sera différent, pensa t-elle de toutes ses forces. Elle eu l'impression d'être aussi stupide qu'une petite fille croyant au père noël, mais cette fois-ci, la belle brune voulait y croire quoi qu'il puisse lui en coûter. Elle avait enfin trouvé quelqu'un qui l'écouterait et qui serait là pour elle. Alors peut importe ce que cela pouvait engendrer dans son métier de tueuse, mais elle décida de se laisser aller dans cet amas de tendresse. « Il y a six ans, j'ai été témoin d'un meurtre. La même nuit j'ai perdu l'être le plus cher à mes yeux. » commença t-elle d'une voix rauque. « Depuis je me suis renfermée dans une solitude que je ne contrôle plus aujourd'hui mais qui me fait de plus en plus mal. Je ne sais pas de mots pour expliquer combien l'absence de cet être me dévore un peu plus chaque jour, ni même pour te dire exactement pourquoi est-ce que je te dis ça à toi, ici et maintenant. » Tout à coup, la voix de la brunette était redevenue froide et distante comme si elle voulait se protéger malgré ses confessions. Elle fixait sa chienne allongée sur le sol qui ne faisait pas un bruit, mais elle ne pouvait se délasser des bras de Samuel. Avec un faux sourire, elle essaya de cacher la tristesse que son corps entier dégageait, mais en vint. Elle inspira alors un bon coup et reprit sur un ton moins sombre : « Samuel, elle me manque tellement si tu savais... La vie n'a plus aucune saveur à présent. Et je n'ai jamais retrouvé personne qui puisse m'y redonner goût... » Sans guider réellement ses gestes, elle glissa sa main sur son épaule et croisa ses doigts avec ceux du jeune homme, priant pour ne pas tout gâcher.